mardi 3 novembre 2009

Tarnac : l’histoire sans fin








Paru sur POLICE et CeTeRa le blog de Georges Moréas

Les avocats de Julien Coupat auraient effectué une contre-enquête qui « malmène la version policière et remet en cause le travail effectué par le juge antiterroriste… ». Une note de 7 pages pour « inviter » le juge à instruire à charge et à décharge. Donc, sous-entendu, ce n’est pas le cas aujourd’hui. Fichtre, on aimerait en savoir plus ! S’agit-il réellement d’une contre-enquête ? Et si oui, effectuée par qui ? Des détectives privés ? Ou s’agit-il d’un épluchage systématique de la procédure pour en souligner les carences ? Ou tout simplement d’un coup de com’, pour attirer l’attention sur un dossier qui roupille ?

À dire vrai, si les avocats relèvent certaines incohérences dans les procès-verbaux, comme des traces de pneus ou des traces de chaussures qui ne collent pas, cela n’a pas réellement d’importance. Quel que soit le rôle qu’aurait pu tenir tel ou tel suspect, tout le monde a bien compris que cette procédure concernant le sabotage de lignes du TGV ne tient pas la route.

Et le plus rigolo, c’est que ce sont les policiers eux-mêmes qui se sont pris les pieds dans le tapis. Ainsi, Coupat et son amie sont accusés d’actes de sabotage qu’ils n’auraient pas pu commettre puisqu’au moment des faits ils auraient été sous la surveillance des enquêteurs de la DCRI…

Et derechef Me William Bourdon de demander l’audition des policiers, sachant très bien que la DCRI est placée sous la protection du secret-défense (tiens, encore lui!); et que les policiers chargés de l’antiterrorisme peuvent être autorisés (je ne sais pas si c’est le cas ici) à ne pas mentionner leur identité dans les actes de procédures (loi du 23 janvier 2006).

On va se dire qu’ils sont nuls de chez nul à la DCRI… La peinture de leurs bureaux n’est pas encore sèche qu’ils commettent leur première bévue ! La vérité, c’est que les instructions intempestives du ministre de l’Intérieur de l’époque (MAM), les a obligés à casser une enquête qui n’était pas mûre. « La DCRI surveillait ces individus depuis longtemps », nous dit Bernard Squarcini, le patron de cette direction, dans une interview au Point du 12 mars 2009. « Nous savions ce qu’ils faisaient, avec qui ils étaient en contact - en France et à l’étranger. Assez pour savoir que ce groupe se situait dans les prémices de l’action violente (…) Quand le ministère de l’Intérieur et la justice nous l’ont demandé, nous avons communiqué nos éléments. Ils sont dans le dossier du juge. C’est pourquoi je peux vous dire qu’il n’est pas vide… »

Les avocats sont dans leur rôle en criant haro sur une procédure mal fagotée. Mais ils savent bien que dans cette affaire, le sabotage SNCF n’est que la partie apparente de l’iceberg. Tout tient dans ces mots : association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Un dossier bâti jour après jour durant des mois de surveillances, d’écoutes, etc. Ce qu’on appelle dans le jargon une procédure fourre-tout où les éléments, même les plus anodins, s’imbriquent les uns dans les autres pour former la base de l’infraction : l’élément matériel.

Une telle procédure appliquée à une équipe de braqueurs, pour prendre un exemple simple, consisterait à effectuer des surveillances quotidiennes pour démontrer que les individus se connaissent, qu’ils se fréquentent régulièrement, qu’ils se réunissent avant chaque coup, ou pour préparer un coup, qu’ils se trouvaient dans le secteur où a été perpétré le hold-up, etc. Et si possible on attend l’embellie, le jour où l’un d’eux va commettre une boulette pour intervenir - sur l’initiative du chef sur le terrain - et pas à la demande d’un quelconque paperassier.

Mais il s’agit ici d’actes concrets, en l’occurrence de braquages. Peut-on appliquer la qualification d’association de malfaiteurs à des gens qu’on suspecte d’avoir l’intention de…

Je ne crois pas. Entre la préparation caractérisée d’un crime ou d’un délit, telle que prévue par le Code pénal, et la simple intention, il y a un fossé. Cette équipe de Tarnac était placée sous surveillance par prévention, dans l’hypothèse où ses membres auraient eu l’intention de préparer des actes terroristes.

Et surtout pas pour faire un coup médiatique. « Les services de renseignement, nous dit M. Squarcini, sont au centre opérationnel d’une immense gare où tous les trains doivent arriver à l’heure. Quand tout marche bien, on n’en parle pas ».

Eh bien cette fois, sabotage de caténaires ou pas, les trains ne sont pas arrivés à l’heure. Et cette histoire, on n’a pas fini d’en parler.






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